Au fond, photographier est un acte beaucoup plus complexe que l’idée qu’on s’en fait. Appuyer sur un bouton, même s’il porte le nom de déclencheur, ne suffit pas. Son nom n’est d’ailleurs pas très adéquate, car l’élément déclencheur se produit bien plus en amont de la prise de vue.
Appuyer sur le bouton de l’appareil photo ne déclenche pas le processus créatif, celui ci commence bien avant, par l’idée, l’envie, la personnalité, la vision du photographe, et même l’achat du matériel photo.
La création de notre photographie ne s’arrête pas non plus après ce clic-clac. Une scène qui intéresse un photographe peut amener ce dernier à réaliser de nombreuses prises de vue, 2, 10 ou 50. Il faut donc trier, sélectionner, éliminer, il faut choisir LA photo que l’on gardera, celle qui nous plait le plus. Beaucoup d’artistes disent qu’un bon photographe est celui qui ne montre pas ses mauvaises photos. Tout est dit.
Le déclenchement, que l’on peut également appeler l’instant de prise de vue, n’est finalement pas le plus important. Disons les choses autrement: ce n’est pas l’unique moment important dans la réalisation d’une photographie. Beaucoup de paramètres interviennent avant et après, et tous ont leur importance. Choisir la mauvaise photo peut ruiner le travail de prise de vue. Ne pas savoir ce que l’on veut photographier peut avoir la même conséquence.
Aussi, penser qu’un photographe doit absolument être capable d’obtenir la bonne photo dès la prise de vue devient ridicule. Car obtenir une bonne photo est un processus vraiment complexe, et le photographe doit le maitriser du début à la fin, de A à Z. Choisir son appareil photo, savoir ce qu’il a envie de photographier, se déplacer pour photographier, sélectionner ses photos, les développer et les imprimer.
Vous êtes vous déjà posé de telles questions ? Avez vous déjà réfléchis à ce que représente l’acte de photographier ? Si vous êtes intéressés par ces questionnements philosophiques sur cette pratique artistique, je vous invite alors à lire le livre Petite philosophie pratique de la prise de vue photographique.
Ce livre, co-écrit par le photographe Jean-Christophe Béchet et la philosophe Pauline Kasprzak, est un régal de lecture qui pousse le lecteur à la réflexion. Construit sous forme de dialogue, Pauline représentant la « théorie » et Jean Christophe la « pratique », il reprend de longues conversations entre les deux protagonistes qui ne devaient être, à la base, qu’une simple interview autour du cadrage.
Les différents chapitres interrogent le lecteur sur tous les aspects de la prise de vue. Le couple indissociable cadrage/composition; l’avant et l’après cadrage; l’influence du choix de l’appareil photo en fonction du type de photographie que l’on souhaite faire, de notre personnalité ou bien même de notre corpulence; l’éditing, qui revient à ne montrer que la partie immergée de l’iceberg: les bonnes photos; la matière; le réel; et le marché de l’art.
S’il est vrai que la façon qu’a Pauline de s’exprimer est parfois légèrement complexe, certainement du à son statut de philosophe, le livre n’est pas pour autant un ouvrage philosophique à proprement parlé. Jean-Christophe est là pour nous remettre les pieds sur terre en nous faisant directement entrer dans la pratique concrète de la photographie. Pauline le pousse à se poser les bonnes questions, et Jean Christophe y répond assez brillamment.
Avant de se ruer sur les livres techniques, sans toute fois vouloir dire qu’ils ne sont pas utiles, bien au contraire, je conseillerai à quiconque, photographe amateur ou professionnel, débutant ou aguerri, de se plonger dans cet ouvrage. Accessible à tous, je suis certains que vous ne regretterez pas vos dix euros dépensés !
Comme le dit si bien Jean Christophe Béchet: photographier, c’est toujours choisir !
13 Responses to Photographier, c’est toujours choisir !
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« Photo de rue à la Fondation Louis Vuitton Le droit à l’image en photo de rue »
« Le déclenchement, que l’on peut également appeler l’instant de prise de vue » : en fait, ce sont deux notions différentes. La prise de vue consiste à saisir (prise) ce que l’on voit (vue). C’est un acte réfléchi et assumé. En revanche, le déclenchement n’est qu’un geste mécanique effectué au moment opportun. Un déclenchement peut être télécommandé, ou provoqué par un détecteur de mouvement ou de son, ou par la rupture d’un faisceau infrarouge ou la détection d’un éclair ; dans tous ces cas, la vision n’est pas mise à contribution. Mais la prise de vue – la vraie, celle qui est revendiquée par le photographe -, passe toujours par une visualisation.
Merci Bernard pour cette explication 😉 Concernant le livre, tu le connaissais ? Lu ? Plu ?
Je me suis longtemps demandé quand on verrait ce type de publication. Lors de mes cours de philo le prof avait introduit son cours par un laïus pour nous faire comprendre que tout était philosophique ou que l’on peut faire de la philosophie de tout.
Je verrai pour prochainement lire ce livre qui semble avoir un certain intérêt, loin de la technique et du matos de geek
Pyrros Articles récents…Découvrez le guide du photographe voyageur par Fred Marie
N’hésites pas tu ne seras pas déçu ! Loin de la technique c’est à agréable 🙂
mmmm, il me tente beaucoup ce livre ! C’est à la lecture de ce genre d’ouvrage qu’on se rend compte de la méconnaissance totale de ce qu’est en fait la photographie.
Pour ajouter mon petit grain de sel, je dis souvent que la photographie est à l’opposé de la peinture et notamment (et entre autres) en ce qui concerne la dextérité technique. En photo, finalement la technique est relativement simple (on a au fond 3 seulement paramètres : ouverture, vitesse, sensibilité). Le pendant à cette relative simplicité, c’est l’extraordinaire complexité pour remodeler la réalité telle qu’on veut la montrer.
Merci Thomas !
Je t’en prie Laurence et merci à toi pour ton grain de sel 🙂 J’ai justement pensé à toi par moment lorsque je lisais le livre en me disant qu’il te plairait certainement !!! 😉
Livre qui semble interessant.J’ai découvert JC Bechet avec Réponses Photo.C’est un photographe que j’aime bien et qui, dans un numero special « street photography »,m’a permis de découvrir certaines astuces dont j’essaye de me servir.(cela fait peu de temps que je photographie la rue).
Affaire à suivre…:-)
Je ne connaissais pas JC Béchet avant de lire ce livre, une nouvelle découverte 🙂
[…] mon précédent article, je vous présentais le livre Petite philosophie pratique de la prise de vue photographique co-écrit par Pauline Kasprzak et Jean-Christophe Béchet. Ce dernier dit une phrase intéressante […]
Mmmmh, j’étais plutôt hermétique aux cours de philo à l’époque… Mais ça c’était avant ;-P Pas sûr que je passerai à la caisse pour autant, mais je le feuilletterai avec curiosité lors de mon prochain passage en librairie !
J’étais aussi hermétique à ça, mais j’ai beaucoup aimé le livre 😉
Bonjour.
Juste merci d’avoir écrit cet article, je viens de terminer la lecture de cet ouvrage, excellent et très intéressant.
Une très bonne suggestion de lecture pour tout ceux qui essaient de faire des photos.
Amor Articles récents…Un fil de photos en avril
Mais je t’en prie 😉 Je l’ai adoré alors je l’ai partagé, et je suis ravi qu’il t’ai plu !